Il fut un temps où la lagune n’était pas une poubelle

Les anciens s’accordent tous pour faire la même affirmation, dans leur jeunesse, l’eau était plus limpide qu’aujourd’hui, et moins haute.

Arsenale1960

Sur cette photos prise entre les deux guerres à l’occasion d’une grande marée basse, on peut voir les galets derrière l’Arsenale. La passerelle de fer n’existait pas encore, et celle de bois, plus basse, semblait bien plus périlleuse.

Ce que l’on remarque surtout, sur cette photo, c’est qu’il n’y a aucun déchet, aucun plastique, aucune bicyclette rouillée et pas plus de vieille machine à laver le linge sur les galets. Si l’eau baissait autant de nos jour, le spectacle ne serait pas le même !

Arsenale

1897

C’était une époque où, enfant, on pouvait pécher dans les canaux, et dès que la chaleur écrasait la ville, se baigner sans danger.

L’Église de San Clemente

L’Église de San Clemente

L’église de l’île de San Clemente, tournée vers le soleil levant symbole du Christ, fut érigée en 1131 et devint rapidement un lieu de rassemblement des pèlerins.

D’origine romane, comme le monastère, sa façade, qui remonte à 1485, est de style Renaissance lombarde. Malgré les remaniements effectués au XVIIème siècle elle a conservé le style du XVème siècle. De la façade primitive il reste la Madone à l’Enfant enchâssée dans un des arcs de la façade.

L’intérieur de l’église a été également remanié, comme le témoignent les transformations de style Renaissance apportées à la corniche qui supporte la partie la plus ancienne. La restauration de l’église fut effectuée par les Camaldules, avec le soutien financier de Bernardo Morosini qui confia les travaux à Andrea Cominelli en 1653.

L’église de S. Clemente n’a jamais été vraiment reconstruite, elle a été profondément modifiée au fur et à mesure des agrandissements et restaurations successifs, de sorte qu’il est difficile d’en retrouver le plan d’origine. Cette dernière avait probablement un plan roman à croix latine, à nef unique avec transept, accueillant le maître-autel et l’abside. L’église était certainement de style transition roman-gothique, comme le témoigne la fenêtre en ogive, signalée par Seguso et aujourd’hui disparue, et par la hauteur de la voûte en berceau de la nef centrale ; toutefois aucune document retrouvé jusqu’à présent ne l’atteste avec certitude.

L’Église de San Clemente

L’église a été enrichie aux  XVIIème et  XVIIIème siècles de sculptures et de bas-reliefs, mais les monuments les plus importants sont les tombeaux des Morosini. A la moitié du XVIIè siècle, en effet, elle avait déjà été transformée par la construction de la Chapelle de Notre-Dame de Loreto.  Du côté de la Maison de Loreto, tourné vers les fidèles, se trouve le maître-autel de l’église, à l’opposé, du côté du chœur, se trouve  le très beau bas-relief de Giuseppe Mazza  représentant la naissance du Christ et l’adoration des bergers, réalisé dans les fonderies de l’arsenal en 1703.

Le chœur, au fond de l’abside,  comportait des stalles en noyer réalisées en 1672; cinq grand tableaux de 1748, d’auteur inconnu, ornaient les murs. On ne sait pas s’ils sont du même auteur ou s’ils ont été peints par des artistes différents, mais ils dénotent l’influence de l’école  vénitienne en particulier celle de Ricci i et celle de Tiepolo.

La sacristie est une des parties les plus belles de l’église avec ses murs recouverts de vieilles armoires en noyer foncé et de compartiments en bois travaillés avec finesse destinés à recevoir les ornements et les objets du culte. Malheureusement l’humidité de la pièce a laissé des marques profondes aussi bien dans le mobilier que dans les structures, comme du reste dans la plus grande partie de l’édifice.

L'église de l'île de San Clemente

Le marquis Pano Maruzzi

Le marquis Pano Maruzzi (1720 – 1790), banquier de Courfou et attaché à la religion grecque, était venu à Saint-Pétersbourg où il fut décoré, par l’impératrice Catherine II, du cordon de Sainte-Anne en 1764 et du titre de Ministre de Russie à Venise le 10 mars 1768.

Il épousa la princesse Zoie (Zoe) Ghika (de Moldavie) qui avait fui son pays avec sa mère, Luxandra Moruzi, veuve de de Scarlat Ghica (1715-1766), souverain de la Roumanie. Ce portrait de Zoe Ghica a été réalisée en 1777 sur l’ordre de la Grande Catherine, par le célèbre portraitiste suédois Alexandre Roslin, il est actuellement exposé au Musée national de Stockholm .

Alexander Roslin – Princesse Zoie (Zoe) Ghika

Le banquier grec offrit en reconnaissance trente-cinq millions tournois pour financer l’expédition d’Alexis Orloff contre l’empire Ottoman.

Zoe Ghika et Pano Maruzzi eurent trois fils : Pano, Constantino (né à Moscou le 16 septembre 1784) et Lambro qui furent faits marquis, à Venise, par l’Impératrice Maria Teresa par Souveraine Résolution du 30 mars 1819. Il devient, dès lors, assez difficile de démêler si on parle de Pano Maruzzi père, ou de Pano Maruzzi fils, car, de plus, ils furent tout deux « ambassadeurs de la cour de Russie à Venise », et tout deux fait marquis. Seules les dates nous aident à nous y retrouver, après la mort du père, on peut supposer que c’est du fils dont on parle. Toutefois, les éléments biographiques du fils sont épars et souvent confondus avec ceux du père.

Constantin Maruzzi, Grand Prieur de l’Ordre de Malte, est mort à Venise (sans postérité selon M.D. Strudza) le 20 février 1846.

Zoe Ghika et Pano Maruzzi eurent également une fille, Alexandra Maruzzi, née en 1790 qui épousa le comte Sergei Soumarokov (1791-1875). Ils vécurent à Saint-Pétersbourg, sur la Serguievskaya où, en juillet 1829 est née leur fille unique, Elena.

La très belle comtesse Elena Soumarokova fut la dernière descendante de la famille.

Sumarokova_Elena

Pietro Buratti dans un de ses célèbres pamphlets fait, du marquis Pano Maruzzi (le fils aîné, également ambassadeur de la cour de Russie) le héros de l’Elefanteïde.

Le 30 novembre 1825, dans une lettre à M. Strich, Stendhal écrit à son propos : « Le marquis Maruzzi, dont Buratti se moque dans l’Elefanteïde, a quatre-vingt mille livres de rente et jouit à Venise du plus grand crédit ; c’est un roué Russe qui aurait bien pu faire noyer le poète dans quelque canal.« 

Le 16 novembre 1879, Pierre Rousseau écrit dans son Journal Encyclopédique : « Le marquis Maruzzi, qui réside à Venise de la part de cour de Russie, ayant requis, au nom de sa souveraine, le Senat d’accorder l’entrée des ports de cette République aux escadres de cette puissance, il lui a été répondu qu’on ne pouvait s’engager à les recevoir, ni à leur fournir des provisions, la régence devant, avant tout, penser à se ménager la Porte et les autres alliés, et qu’on admettrait jamais plus de trois vaisseaux à la fois.« 

Les historiens pensent que le père, époux de Zoe Ghika, serait le commanditaire à Guardi d’une série de peintures sur la visite à Venise en janvier 1782 du Grand-Duc Pavel Petrovitch et de son épouse Maria Fedorovna, venus « incognitos » sous le nom de comte et comtesse Severny.

Banquet Tsarevich-Pavel-Petrovich- Venise

Sources bibliographiques :

Franco Venturi, Settecento riformatore.

Sergey Androsov, Russian Patrons and Italian Artists in the 18th Century

Le sceptre du gondolier

Les sceptres ou « bâtons d’apparat » des gondoliers Vénitiens étaient utilisés lors des fêtes nautiques et des défilés de la Sérénissime depuis le XVIème siècle.

Sceptre de gondolier

Ce sceptre de gondolier est un souvenir rare du début du XIXème siècle, de 85 centimètres de long, ce long bâton de bois est encerclé de métal. La partie supérieure (à droite sur notre photo) est décoré avec un fero di prova. Le corps, à quatre pans, est incrusté de médailles commémoratives et de monnaies du XVIIIème et du début du XIXème siècle.

La symbolique attachée au fer de proue des gondoles, s’élevant en panache, renvoie à l’orgueil des gondoliers. Dans sa découpe du métal stylisé apparaissent la corne du Doge, les 6 sestieres de Venise, la Giudecca et les 3 îles de la lagune (Torcello, Murano et San Michele)

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Cet autre sceptre du début du XIXème siècle est en en métal plaqué d’argent figurant la tête du lion de San-Marco en ronde-bosse, le fût est avec un décor tournoyant de spirales dans la partie basse et de chevrons dans le haut, la bouterolle est à godrons.

Les sceptres de gondoliers ont disparus à la fin du XIXème siècle.

Véronèse dans l’église de San Sebastiano

Nous sommes vraiment désolés !

Nous n’avons pas encore terminé avec nos histoires à propos des peintures de Véronèse dans l’église de San Sébastiano. Pensez, nous avons passé une journée entière à tout découvrir pour vous, alors, nous savourons notre plaisir de vous raconter tout ce que nous y avons appris.

Dans les prodigieuses Scènes de la vie d’Esther, pour le plafond de l’église, les tons purs et contrastés accentuent la solidité majestueuse des structures et des personnages.
Les fresques (Scènes de la vie de saint Sébastien) pour la nef centrale (1558), les Pèlerins d’Emmaüs (désormais au Louvre), la Présentation au Temple (de nos jours à Dresde, Gg), les tableaux de l’orgue et le retable du maître-autel (la Vierge en gloire avec saint Sébastien et des saints) sont autant d’étapes d’un développement logique qui aboutit au Repas dans la maison de Simon exposé de nos jours à la Galeria Sabauda de Turin.
Selon certains historiens d’art, Véronèse aurait, lors d’un voyage à Rome fait une étude attentive du Jugement dernier de Michel-Ange. De cette confrontation, l’artiste aurait développé une imagination fraîche et puissante et par une aisance sereine, la lumineuse et transparente poésie d’un monde fantastique de couleurs que nous lui louons de nos jours.

Martyr de saint sébastien

Madone en gloire avec les saints

Jean Gabin et Giancolombo dans « La Traversée de Venise »

C’est un film de ce monstre du cinéma que les français ne connaissent pas, et pour cause, il n’a jamais été tourné !

En 1956, Jean Gabin est à Venise où le film La Traversée de Paris de Claude Autant Lara est présenté à la Mostra du cinéma (où il obtiendra le Lion d’Or). Le photographe milanais Gian Battista Colombo, né à Venise en 1921, lui propose alors de réaliser une version vénitienne du film : avec la fameuse valise pleine de viande de porc à la main, Gabin va donc traverser Venise, pour faire plaisir à son ami.

Dans les années 1950, l’importance de la Mostra est finalement reconnue au niveau international. Le festival connaît une période de forte expansion et participe à l’affirmation de nouvelles écoles de cinéma comme les écoles japonaises et indiennes avec l’arrivée des plus grands réalisateurs et des plus grandes stars.

La traversée de Paris a connu un grand succès car il a fait 4.893.174 entrées, le plaça ainsi en 4ème position, du box-office de 1956. Il a reçu plusieurs récompenses notamment la coupe Volpi pour la meilleure interprétation masculine pour Bourvil, le Prix du meilleur film par le syndicat français de la critique du cinéma 1956, le Lion d’or de la Mostra de Venise 1956, le Prix Méliès en 1957 et  la nomination pour Jean Gabin au BAFTA 1957 dans la catégorie « meilleur acteur étranger ».

Gian Battista Colombo était devenu Giancolombo en 1946 à la suite d’une erreur de typographie dans le journal Corriere Lombardo, et il gardera ce pseudonyme le restant de sa carrière. Il travaille pour de nombreux titres, italiens : Europeo, Tempo, Panorama, Settimo Giorno, Oggi, Gente, Grazia, Epoca, Visto, Le Ore di Salvato Capelli, et, à l’étranger : Paris Match, Life, Picture Post, Schweizer Illustriert, Stern, Jours de France, Daily Express.

Giancolombo s’est éteint en 2005, mais sa fille, Suzana, conserve encore l’écharpe en soie bleu que Jean Gabin offrit à son père en remerciement à cette occasion (l’élégance des grands artistes…).

Nous avons souhaité vous montrer les photos de la traversée de Venise, par Jean Gabin, une valise à la main. Nous remercions chaleureusement Susanna Giancolombo qui nous a envoyé des photos inédites malgré tous les problèmes qu’elle a déjà eu avec les téléchargements de photos et leur utilisation illégale.

Jean Gabin devant la basilique San Marco

Jean Gabin sur la piazza San Marco de Venise

Jean Gabin sur la piazza San Marco en 1959

La Traversée de Venise par Jean Gabin

La traversée de Venise par Jean Gabin

Jean Gabin à Venise, photographié par Giancolombo

Jean Gabin à Venise, photographié par Giancolombo

Photographies avec l’aimable autorisation de Giancolombo

Copyright © Giancolombo

Les Echappées Belles avec Florence, Maria, Davide, les deux Francesco…

Nous vous avons déjà parlé de l’émission qui passera Samedi 20 septembre 2014 de 20:37 à 22:10 heures sur France 5. Nous avons, en effet, été sollicités pour aider, en amont, à trouver des partenaires qui accepteraient de participer à l’émission pour montrer un visage différent de Venise.

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L’équipe était composée de quatre personnes, le réalisateur Jean-Yves Cauchard, l’ingénieur du son Gaspard Baudry et l’assistante-traductrice Céline Boutte, autour de l’animateur-voyageur Raphaël de Casabianca, qui est un des trois présentateurs, en alternance de l’émission.

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Il nous avait été demandé de les mettre en relation avec des personnes sur Venise qui leur présenterait, de façon positive, des aspect méconnus de cette ville dont les médias ont déjà tout dit…

Les conditions ont été idéales, puisque pendant les 8 jours qu’a duré le tournage, le soleil a brillé avec des températures estivales. Jean-Yves, Gaspard et Céline étaient déjà venus à Venise, mais c’était la première fois pour Raphaël qui appréhendait un peu la découverte de ce qui est souvent présenté comme une « ville-musée »… Raphaël a finalement été très agréablement surpris par le sens du partage, de l’entrepreneuriat mais aussi la passion des Vénitiens pour la sauvegarde de leur ville.

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Globalement d’ailleurs, l’équipe est rentrée pleine d’excellents souvenirs de moments partagés avec leurs interlocuteurs : les Vénitiens qu’ils ont rencontrés avaient vraiment à cœur de montrer un autre visage de Venise. Et c’est ce que l’équipe a ressenti en découvrant, par exemple, la lagune avec Francesco, leur guide-taxi très vite devenu un ami. Certaines rencontres les ont marqués ; des gens extraordinaires comme ces dernières dentellières italiennes à Burano ou ce jeune agriculteur sur Vignole, les derniers artisans de mosaïque du Cannaregio, ou encore les habitants du Castello qui se revendiquent comme étant les seuls « vrais Vénitiens »…  Certaines scènes qui seront présentes dans l’émission relèvent de l’improvisation (un des intervenants initialement prévus, qui s’est désisté, a été remplacé par Francesco Pannoli qui nous a menés à la rencontre de Michel Thoulouze par exemple), tant la plupart des interlocuteurs se sont avérées être des personnalités très attachantes.

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Les découvertes les plus marquantes de l’équipe pendant ce tournage ont sans doute été la lagune, parfois injustement boudée par les touristes mais pleine d’un charme paisible sous les atours roses et rouges d’un soleil couchant ; le sestiere de Castello qui regorge d’églises et d’Histoire ainsi que de « calli » typiquement vénitiennes et pour lesquelles nous avions, avec Claudio Boaretto un guide merveilleux (voir son article à propos de ce tournage), lui qui est natif de cette partie de Venise ; mais aussi les nombreuses spécialités culinaires de la Sérénissime (spaghetti à la fraise, crevettes et crabe, gnocchi à la vénitienne, au safran et curcuma, artichauts violets à la vénitienne ou encore les pates alio, oglio e peperocino), qu’ils ont dégustées grâce à leurs hôtes Maria et Florence.

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Au cours de sa visite de la ville, Raphaël va donc découvrir les quartiers du Castello et du Cannaregio avec son accompagnatrice Florence Boaretto, pour qui il était important de montrer les quartiers vénitiens épargnés par le tourisme de masse. Raphaël a ainsi la chance de visiter la fabrique de mosaïque Orsoni par exemple.

Traduttrice

Ensuite, son périple le mène dans le centre de la ville, autour de la place Saint Marc, avec Davide Busato, spécialiste de la Venise criminelle, qui lui en compte les anecdotes les plus sombres et croustillantes. On part ensuite sur la lagune avec les deux Francesco, Badiene et Pannoli, le premier abordant les problématiques liées à l’environnement et la préservation des eaux et des îles vénitiennes, le second l’emmenant à la rencontre de Michel Thoulouze qui cultive ses vignes sur les terres salées de la lagune. Raphaël retourne ensuite sur la terre ferme pour accompagner Maria, chef de l’osteria Alba Nova, et apprendre que si la cuisine « italienne » est peut-être un abus de langage – tant chaque région d’Italie a son identité culinaire – la cuisine vénitienne, elle, est une réalité bien tangible. Enfin, notre voyageur s’accorde une petite virée nocturne, pour découvrir les différentes facettes de la Venise qui ne dort pas…

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Les autres sujets abordés dans l’émission seront les suivants :

– Venise, ville des amoureux

– La Vogalonga

– Les Vénitiens face au tourisme de masse

– Les souffleurs de verre de Murano

– Les îles insolites et méconnues de la lagune

– 24h sur le grand canal

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Lettre du Préfet Cassiodore aux Vénitiens

Cassiodore (en latin Magnus Aurelius Cassiodorus Senator) est un homme politique et écrivain latin, fondateur du monastère de Vivarium. Il est né vers 485 à Squillace, dans l’actuelle province de Catanzaro en Calabre et mort vers 580.

Cette lettre est écrite en l’an 537 après JC par le Prefetto Pretorio del Re Ostrogoto Vitige aux tribuns Maritimes Vénitiens.

537 D.C

Flavius ​​Magnus Aurèle Cassiodore était le petit-fils de Cassiodore II qui avait dirigé l’ambassade du pape Léon le Grand pour arrêter l’invasion d’Attila en Italie.

Flavius ​​Magnus Aurèle Cassiodore

En l’an 537 la récolte de vin et d’huile d’olive en Istrie avait été particulièrement abondante, et le préfet écrit aux Vénitiens pour les charger du transport maritime de ces produits à Ravenne, la capitale du royaume des Ostrogoths.

Dans cette lettre, on apprend qu’à cette époque les Vénitiens habitaient les marais côtiers de Ravenne depuis la sixième année. Cassiodore écrit, « … est bordée au sud par Ravenne et le Pô, à l’Est tout en profitant de la beauté de la côte ionienne… » Au siècle de Cassiodore la mer Adriatique était en fait considérée comme un bras de la mer Ionienne.

Nous apprenons que, à l’époque de Cassiodore déjà, les Vénitiens étaient célèbres comme d’habiles marins et constructeurs. Le préfet laisse, du reste, comprendre que la gloire et la noblesse de ces personnes sont bien connues depuis l’Antiquité.

Leur patrie est l’eau, et les navires peuvent les conduire dans tous les pays. Ils ont du reste une monnaie internationale, le sel, qui leur permet de commercer dans chaque pays. Ils savent comment faire face à la mer en colère, mais ils connaissent les chemins de navigation côtière et les voies navigables intérieures protégées, afin d’assurer la livraison rapide de leurs cargaisons par tous les temps.

À l’époque, les Vénitiens n’ont pas encore construit la ville que nous connaissons aujourd’hui. Leurs maisons sont éparpillées sur les ilots émergés proches des marais salants, tels qu’on peut encore les voir dans la lagune de Marano.

Le document est très important car, en plus d’établir une présence significative des Vénitiens comme une figure collective déjà bien définie et homogène dans le sixième siècle de notre ère, il montre qu’ils ont déjà des coutumes et des traditions très différentes des peuples du continent.

Casoni de la lagune de Marano

Tribunis maritimorum Senator, praef. praet.

1.Data pridem iussione censuimus ut Histria vini, olei vel tritici species, quarum praesenti anno copia indulta perfruitur, ad Ravennatem feliciter dirigeret mansionem. sed vos, qui numerosa navigia in eius confinio possidetis, pari devotionis gratia providete, ut quod illa parata est tradere, vos studeatis sub celeritate portare. similis erit quippe utrisque gratia perfectionis, quando unum ex his dissociatum impleri non permittit effectum.estote ergo promptissimi ad vicina, qui saepe spatia transmittitis infinita.

2.Per hospitia quodammodo vestra discurritis, qui per patriam navigatis. accedit etiam commodis vestris, quod vobis aliud iter aperitur perpetua securitate tranquillum. nam cum ventis saevientibus mare fuerit clausum, via vobis panditur per amoenissima fluviorum. carinae vestrae flatus asperos non pavescunt: terram cum summa felicitate contingunt et perire nesciunt, quae frequenter inpingunt. putantur eminus quasi per prata ferri, cum eorum contingit alveum non videri. tractae funibus ambulant, quae stare rudentibus consuerunt, et condicione mutata pedibus iuvant homines naves suas: vectrices sine labore trahunt, et pro pavore velorum utuntur passu prosperiore nautarum.

3. Iuvat referre quemadmodum habitationes vestras sitas esse perspeximus. Venetiae praedicabiles quondam plenae nobilibus ab austro Ravennam Padumque contingunt, ab oriente iucunditate Ionii litoris perfruuntur: ubi alternus aestus egrediens modo claudit, modo aperit faciem reciproca inundatione camporum. hic vobis aquatilium avium more domus est. nam qui nunc terrestris, modo cernitur insularis, ut illic magis aestimes esse Cycladas, ubi subito locorum facies respicis immutatas.

4. Earum quippe similitudine per aequora longe patentia domicilia videntur sparsa, quae natura protulit, sed hominum cura fundavit. viminibus enim flexibilibus illigatis terrena illic soliditas aggregatur et marino fluctui tam fragilis munitio non dubitatur opponi, scilicet quando vadosum litus moles eicere nescit undarum et sine viribus fertur quod altitudinis auxilio non iuvatur.

5. Habitatoribus igitur una copia est, ut solis piscibus expleantur. paupertas ibi cum divitibus sub aequalitate convivit. unus cibus omnes reficit, habitatio similis universa concludit, nesciunt de penatibus invidere et sub hac mensura degentes evadunt vitium, cui mundum esse constat obnoxium.

6. In salinis autem exercendis tota contentio est: pro aratris, pro falcibus cylindros volvitis: inde vobis fructus omnis enascitur, quando in ipsis et quae non facitis possidetis. moneta illic quodammodo percutitur victualis. arti vestrae omnis fluctus addictus est. potest aurum aliquis minus quaerere, nemo est qui salem non desideret invenire, merito, quando isti debet omnis cibus quod potest esse gratissimus.

7. Proinde naves, quas more animalium vestris parietibus illigatis, diligenti cura reficite, ut, cum vos vir experientissimus Laurentius, qui ad procurandas species directus est, commonere temptaverit, festinetis excurrere, quatenus expensas necessarias nulla difficultate tardetis, qui pro qualitate aeris compendium vobis eligere potestis itineris.

Echappées Belles à Venise

Avec Davide Busato

Des caméras qui filment à Venise, nous en avons l’habitude… mais quand nous avons été sollicités pour aider, en coulisses, au tournage  d’une émission de télévision, c’est avec un regard différent que nous attendons le résultat.

Raphaël de Casabianca  déambule à travers la Cité des Doges, de San Marco à Cannaregio, et part dans les îles…

Au sommaire :

1 ) Venise, un amour de ville – Pour beaucoup, Venise est la ville romantique par excellence.
2 ) La Vogalonga, la course de l’espoir – La Vogalonga est une grande randonnée de bateaux à avirons, qui a lieu tous les mois de mai à Venise. Le parcours d’une trentaine de kilomètres passe par les îles Burano et Murano.
3 ) Les magiciens de Murano – L’île de Murano, au nord de Venise, abrite des artisans à la renommée internationale, spécialisés dans le soufflage du verre.
Les routes d’Échappées belles : «Cuba, sur les traces du Che» – Épisode 3.

 

Samedi prochain, retrouvez notre article exclusif avec de nombreuses photos inédites et les secrets du tournage de l’émission.

Avec Florence Boaretto

Antonio Sandi

Antonio Sandi est né à Puos d’Alpago, près de Belluno, le 9 octobre 1733 ; il y est mort le 14 septembre 1817.

Après des études à Belluno avec Antonio Baratti et Pietro Monaco, il s’installe à Venise, où il a passé la plus grande partie de sa vie.

Il a réalisé un grand nombre de gravures et estampes, et notamment la grande carte de La Veneta Laguna antica e moderna (464 x 621 mm), d’après un dessin de Alvise Grandis, publié par Teodoro Viero en 1799.

La Veneta Laguna antica e moderna, novamenta delineata e distinta nelle sue Isole, Valli, e Canali, quali si trovano al presente

Il a également gravé des portraits, des scènes sacrées et mythologiques et illustrations de livres. Ses œuvres les plus importantes sont les Ventiquattro prospettive di isole della Laguna di Venezia et quatre grands Porti di mare, tous issus de dessins de Francesco Tironi (d c. 1800) et publiés par Ludovico Furlanetto après 1779.

De plus  il a gravé des vues de Venise d’après Francesco Guardi, Canaletto et Giambattista Moretti , huit plaques d’une série de vues de Padoue, le Teatro prospettico, après Belluco, et les XXIV costumi veneti d’après Francesco Novelli (1764-1836).

Ponte di Rialto

Porte dell'Arsenale

Torre dell' Orologio

Carnaval de Venise

En 1004 le carnaval était déjà mentionné dans une charte du doge Vital Faliero de Doni, et en 1269 le Sénat prescrivait qu’on eût à considérer la veille du Carême comme un jour de fête (Mardi Gras).

Carnaval

On pouvait alors porter le masque, grâce auquel on retrouvera plus tard une ombre de l’égalité perdue au cours du temps, quand, sous des vêtements d’emprunt, les nobles fraternisaient encore avec le peuple.

Quant à celles jugées moins séduisantes, elles recevaient des œufs … pourris. En 1268, un décret interdit aux hommes masqués de s’adonner à ce jeu.

Au XVI siècle , contrôlé par les autorités, le carnaval officialisa certaines coutumes, comme le port du masque, les divertissements sur les petites places.

Beaucoup de jeux particulièrement cruels, et heureusement disparus, se déroulaient alors au détriment d’animaux.

– On s’adonnait au jeu de l’oie.

Pendue au-dessus d’un canal gelé, une oie devait être décrochée, quel qu’en soit la manière.

– Le jeu du chat

On attachait un chat vivant à un poteau vertical et le jeu consistait à se précipiter, la tête la première contre le pauvre chat, pour l’écraser.

– Les courses de taureaux.

On lâchait des taureaux dans des lieux clos, où les chiens venaient les mordre.

– Ou encore, le jeu des échasses

Des personnages masqués, juchés sur des échasses, arpentaient à toute vitesse les ruelles et traversaient les canaux.

Pas besoin d’un service d’ordre, ou de forces de sécurité : tout ce grand mouvement passait, et s’écoulait paisible et joyeux à travers les calli, comme une véritable fête de famille.

Le carnaval de Venise par François Flameng

Pour éviter le ressentiment populaire, une loi interdisait aux riches vénitiennes de porter leurs bijoux en public, sauf pendant les fêtes officielles et durant les derniers jours du carnaval ! Le carnaval leur permettait enfin de satisfaire toutes leurs coquetteries.

Au milieu de la multitude animée, mobile, joyeuse, parmi la lueur des torches et le bruit des trompettes, circulaient des masques aux mille déguisements étincelants d’or et de pierreries, et des matrones aux robes précieuses dont la queue immense était soutenue par des servantes.

Au milieu de cette fermentation le peuple était plutôt bon et pacifique.

Inspiré par la Commedia dell’arte, on retrouve les célèbres Arlequin et Pantalon, Polichinelle, Brighella, Colombine, Scaramouche et tant d’autres se rencontraient, s’apostrophaient et faisaient leur comédie sur la place

Le déguisement traditionnel est la « bauta » (un masque blanc, prononcez la Baouta,) comprenant le « tabarro » (une longue cape noire, la « larva » et le tricorne, ou encore le masque d’Arlequin (son habit est coloré à losanges : au XVIe siècle, loin d’être élégant, l’habit était simplement rapiécé pour figurer les haillons d’un mendiant).

La « moretta » est un masque porté par les femmes, ovale, de velours noir complété de voilette et avec un petit chapeau à larges bords. Le « domino »  un manteau long, avec une capuche qui couvre le visage.

carnaval de Venise

 

***

Carnaval


(…)Venise pour le bal s’habille.
De paillettes tout étoilé,
Scintille, fourmille et babille
Le carnaval bariolé.

Arlequin, nègre par son masque,
Serpent par ses mille couleurs,
Rosse d’une note fantasque
Cassandre son souffre-douleurs.

Battant de l’aile avec sa manche,
Comme un pingouin sur un écueil,
Le blanc Pierrot, par une blanche,
Passe la tête et cligne l’œil.

Le Docteur bolonais rabâche
Avec la basse aux sons traînés ;
Polichinelle, qui se fâche,
Se trouve une croche pour nez.

Heurtant Trivelin qui se mouche
Avec un trille extravagant,
À Colombine Scaramouche
Rend son éventail ou son gant.

Sur une cadence se glisse
Un domino, ne laissant voir
Qu’un malin regard en coulisse
Aux paupières de satin noir.

Ah ! fine barbe de dentelle,
Que fait voler un souffle pur,
Cet arpège m’a dit : « C’est elle ! »
Malgré tes réseaux, j’en suis sûr,

Et j’ai reconnu, rose et fraîche,
Sous l’affreux profil de carton,
Sa lèvre au fin duvet de pêche
Et la mouche de son menton.(…)

Théophile Gautier   

Émaux et Camées  Variations sur le Carnaval de Venise

Isola di Sant’ Ilario

Sur l’île de San Ilario, situé sur la bordure ouest de la lagune de Venise, entre Myrtle (autrefois Anconetta) et Gambarare (à l’emplacement de Dogaletto), le doge Angelo Partecipazio construisit une abbaye qu’il confia aux Bénédictins.

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On ne sait que peu de chose à propos de l’île, mais l’abbaye bénédictine possède une longue histoire.

L’abbaye de Saint-Hilaire et Benoît a été fondée en 819 par les moines de San Servolo qui s’étaient installé dans une ancienne chapelle, grâce à une subvention du doge Angelo Partecipazio et de son fils Justiniano. L’institution était située dans une zone stratégique, entre le continent et la lagune, le long des cours d’eau importants qui reliait le continent au duché. L’endroit avait cependant aussi quelques inconvénients, car il était à la frontière avec les territoires rivaux de Padoue et Trévise , et a été exposé aux ambitions des familles féodales locales.

L’abbaye a ensuite étendu ses possessions, dans les vallées du fleuve Brenta (ou Val d’Agredo) et de la rivière Tergola, favorisée par la proximité des principales routes et des rivières sur des territoires de Padoue et Trévise.

Les Doges Pietro Orseolo et Vitale Candiano se retirèrent dans l’abbaye après leur abdication.

L’abbaye fut donc sous la protection d’un groupe d’aristocrates puissants, sous l’égide desquels s’était également réalisé le transfert de la capitale de la lagune, depuis Malamocco à Rialto.

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Les actes notariés qui témoignent de cet héritage au travers des donations nous donnent l’image d’un paysage, près de la ville de Mira, profondément différent du paysage actuel. Le monastère était en fait, au milieu des marais, dans une zone densément sillonnée de rivières et de canaux. Selon toute probabilité, il n’a pas été construit là par hasard, mais dans un lieu stratégique qui contrôlait les routes d’accès à la lagune.

Puis, quand à la fin du Moyen-âge, les padouans modifièrent le cours de la Brenta à la hauteur de Fiesso d’Artico  (1143), la conditions hydrogéologiques de toute cette zone ont radicalement changée. Les marais se sont rapidement envasés et sont devenus insalubres, et l’abbaye s’est retrouvée envahie par les eux, obligeant les religieux à fuir ce lieu et se réfugier à Venise, près de l’église San Gregorio.

Constamment, Trévise a continué à réclamer l’abbaye, en ayant parfois recours à la violence.

La mort du dernier représentant de la famille Peraga, vers le milieu du XIIIème siècle, a conduit au démembrement des fiefs de sant’ Ilario, qui a commencé à être vendue à des tiers.

Au XVIIème siècle, il ne subsistait de l’abbaye qu’une chapelle dans la localité de Dogatello, près de la Malcontenta.

San Ilario 001

Bibliographie :

Alessio Sopracasa, Sui falsi del monastero veneziano dei Ss. Ilario e Benedetto (secc. IX-XIV) in Storia di Venezia – Rivista, II, 2004, pp. 127-146, ISSN 1724-7446

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