Pour réaliser des photos sur un Carnaval Vénitien, il y a d’autres facteurs restrictifs, qui sont complètement indépendants des masques.
J’écarterai les problème de lumière (pas assez ou trop de soleil, est une chose inhérente à la photographie)…
Pendant le défilé. Sauf à choisir le parti pris de photographier un masque perdu au milieu d’une foule compacte, les photos pendant le défilé présentent peu d’intérêt. A moins que …
– il est possible de profiter des spectateurs qui se font photographier en compagnie d’un masque, pour réaliser des choses rigolotes. J’ai réalisé des spots de jeunes russes qui posaient ainsi avec des masques, ignorant que quelqu’un comprenait toutes les bêtises qu’ils racontaient. Reste qu’après, on se retrouve avec le soucis du droit à l’image, et que ces photos-là, si la personne est trop reconnaissable, ne pourront jamais être publiées. Et je me vois mal, dans un carnaval, courir après les spectateurs, pour leur faire signer des autorisations…
– Parfois, la photo d’un masque qui émerge péniblement au milieu d’une nuée de spectateurs agglutinés comme des mouches autour d’un pot de miel peut être amusante. Comme on ne verra pas grand chose du masque, le photographe sera vite blasé. C’est aussi souvent le cas le dimanche après-midi.
– Par contre, j’ai remarqué qu’en fin de défilé, et c’est souvent dans des lieux plus photogéniques, il y a moins de public, et il est possible d’avoir plus de temps pour cadrer sa photos, demander un petit plus, une pose bien précise. L’inconvénient, est que les masques de la fin du défilé, parfois, prennent un raccourci s’ils ont été trop retardé en chemin. Bon, donc, si vous êtes masqué-e ne zappez pas les petites rues d’Annecy les prochaines années, vers les arcades, car tous les photographes qui auront découvert mes "petits secrets" vous attendront là !
Les barrières. Dans certaines villes, les barrières créent deux classes sociales de photographes :
– ceux qui savaient qu’il faut demander une accréditation, et qui, tels des aristocrates de la photo amateur, se conduisent en véritables professionnels, comme à Cannes pour le festival lorsque qu’un photographe accrédité se permet de "tutoyer" les stars, tandis que le pékin lambda restera loin, derrière les barrières à avoir des bouts de nez ou de coiffures, de dos, au travers des vestes des agents de sécurité. Tout le monde n’a pas un Nikon avec objectif orientable et un zoom 30 X !
– les citoyens ordinaires qui, bloqués derrière les barrières doivent gérer les crânes, les téléphones portables brandis devant leur objectif au moment où l’on déclenche, le petit chenapan qui vous bouscule au moment crucial, ou la mémé qui applaudit nerveusement à chaque fois qu’elle entrevoit un fragment de costume, et qui fait vibrer à l’unisson la barrière sur laquelle vous vous étiez appuyé pour tenter un temps de pose plus long…
Le problème, c’est que, vu le succès des carnavals auprès des photographes de tout poils, si tout le monde demande et obtient une accréditation, il y aura bientôt plus de photographes à photographier que de masques… (regardez déjà la photo de groupe des photographes, à Corbeil-Essonne et comparez-là à la même photo de groupe des masques présents à ce carnaval).
Les photographes groupies. C’est d’ailleurs un bon sujet que j’ai un peu exploité cette année (voir certaines des photos publiées).
On croirait une starlette des années 60, entourée d’une meute de paparazzi ! Voilà, chers masques, l’effet que vous nous faites. Vous êtes nos "BB au festival de cannes 1957" à nous. Tout y est : la foule oppressante qui vous enserre, la nuée de photographes, équipés comme pour un safari au Kenya, et les petits rendez-vous secrets, à l’aube ou au crépuscule, dans un endroit discret, pour espérer obtenir LA photo qui sera un scoop unique.
Donc, un bon sujet reste à exploiter encore et encore : les photographes de amies ami-e-s les stars masqué-e-s.
La photo qui fera la différence. Je l’ai évoqué dans le précédent paragraphe, il est aussi très difficile, pour le photographe de faire LA photo qui sera vraiment unique. Même si chacun de nous à son style, si le même masque, au même endroit, au même moment sera restitué différemment par chacun, il est difficile de réaliser des choses originales, sauf si on a un coup de chance. A Verdun, notamment, un photographe a eu le trait de génie de faire poser ses modèles dans la lumière d’un vitrail. Après cinq minutes, nous étions tous là (moi aussi je le confesse !). L’après-midi, nous étions dans le jardin de la Princerie. Alain posait pour Corine et moi au pied d’un arc gothique. Petit à petit, avec d’autres masques j’ai construit une composition avec cinq personnages, dirigeant les masque de la façon à obtenir le résultat que je recherchais. Corinne avait compris mes intentions et dirigeait aussi. Lorsque nous avons fini de shooter, nous avons réalisé qu’une trentaine de personnes prenaient des photos autour de nous. Tellement pris dans mon action, je n’avais rien remarqué.
Tôt le matin, tard le soir, à l’écart…
Il arrive qu’une complicité s’établisse entre des masques et des photographes. On peut alors décider d’une séance particulière. Un repérage préalable dans la ville aura permis de déceler un endroit photogénique, où il sera peut être possible d’espérer un moment de répit pour tenter des photos originales. Parfois aussi, c’est "l’occasion qui fait le larron" : un instant magique saisi au vol, ou une idée originale qui germe au bon moment, au bon endroit.
Faire attention aux avant plans. Si le sujet (en l’occurrence le masque) a le soleil de face, le photographe l’aura donc dans le …
… dans le dos (mauvais esprits !). Et donc, l’ombre du photographe se baladera sans vergogne sur la robe du masque (Si ! Si ! ne riez pas, on voit des photos comme ça sur Internet !).
Eviter aussi la crotte de chien bien en évidence en avant plan ! (ben oui, nos lieux les plus romantiques sont les parcs, et ce sont les mêmes qui sont appréciés par les maîtres de la gent canine…)
Un reflet dans un flaque c’est pas mal… mais dans une eau boueuse et glauque, ça peut faire nauséabond (voir à Annecy)
Se méfier bien évidemment du crâne qui va se planter devant vous à l’instant fatidique… mais aussi de ces satanés téléphones portables (la génération GSM est la plus impolie, la plus irrespectueuse qu’il soit, bravant les interdits et se moquant des conventions – Deux points de moins sur le permis n’empêchent en rien les gens de téléphoner en voiture, pourquoi voulez-vous qu’ils se gênent de vous déranger en se flaquant devant vous quand vous photographiez ?) Je crois que, dans les prochaines années, je vais me costumer en corsaire pour prendre les photos. Cela me permettra d’avoir un sabre, et lorsque je menacerai de couper tout ce qui dépasse devant mon objectif, les indélicats vont peut être entendre mieux ?
Faire attention aux arrières plans !
Vu sur des photos de masques, lors d’un Carnaval Vénitien, cette année :
Une mémé avec un cabas contenant des poireaux, qui regarde les masques, comme si c’étaient des extra-terrestres (A Paris, sur plusieurs photos publiées sur Internet).
Monsieur le maire, les doigts dans le nez (je ne dirai pas où, mais la photo est sur Internet !!!)
Une vieille barque pourrie (à Annecy au bord du lac)
Une autre mémé, assise sur un banc, et qui, jambes entrouvertes, montre sa culotte (A Annecy toujours)
Pour ma part, même en faisant attention j’ai eu :
Des poussettes avec des bébés, des papis et des mamies, des cyclistes (à Annecy, le dimanche matin), des russes (toujours à Annecy), des barrières métalliques (à Remiremont où il était extrêmement difficile de les éviter tellement il y en a partout), des voitures garées en pleine zone piétonne (à Verdun, quai de Londres), la coiffure argentée d’un grand-mère (à Annecy)… bref : 3 carnavals, 3000 photos à peu près, dont 500 ont été détruites aussitôt, 500 autres recadrées.