Vintage Venise

World Film Heritage, c’est un machin anglophone qui récupère des films anciens, les restaure, puis demande des droits dessus… du genre, exception culturelle anglo-saxonne.

Bien que en partie masquée par une publicité déplacée, ces deux films ont pour avantage d’être une mémoire de grande qualité pour la Venise oubliée et que nous aimons avec nostalgie.

Voici donc des images de 1927 :

Et d’autre, plus récentes, puisqu’elles datent de 1938 :

Les pêcheurs de Chioggia

Destination l’Adriatique, au fil de l’eau, en naviguant vers le sud, on jette les amarres sur le charmant petit port de pêche de Chioggia. Avec ses petits canaux, son linge suspendu et son marché au poisson, découvrez avec nous cette petite Venise plus populaire, mais très typique de la lagune. Mais, aujourd’hui, découvrez-là telle qu’elle n’est plus tout à fait…… nous vous entrainons en effet à Chioggia, mais à la lisière des XIX et XXème siècles.


A cette époque, on est encore proche du Baroufe à Chioggia écrit par Goldoni en 1762.

Quand les marins pêcheurs de Chioggia partent six mois en mer, les femmes de Chioggia trouvent leur vie vide de «…»

Alors, quand, sur la place de Chioggia, passe le batelier Toffolo, un des seuls hommes restés à terre, les « sens » des femmes de Chioggia s’allument…

Mais quand, ensuite, les marins pêcheurs de Chioggia rentrent, les langues des femmes de Chioggia font des ravages et la jalousie se réveille…

Les hommes de Chioggia sortent alors les couteaux et les bâtons. Les femmes de Chioggia, elles, n’en ont pas besoin, elles se battent à main nue, à coups de poing, à coups de pied…

Mais quand le baroufe devient trop fort à Chioggia, Vicenzo, l’âme damnée du sombre illustrissime Isidoro, intervient et abuse de son pouvoir, torture et perversion à Chioggia…

À Chioggia, tout finit pourtant toujours bien, car c’est ce que les femmes de Chioggia veulent…

Et quand la femme de Chioggia le veut…

La Peste de retour à Venise

La Peste à Venise

Cette photo de malades de la peste à l’agonie dans la lagune de Venise à été prise le 27 septembre 2014 par la photographe Elena Tagliapietra.

En effet la peste est de retour en ce début de siècle dans la lagune de Venise et dans toute la région.

Même si une certaine omerta pour qu’on n’en parle pas, ou peu, couvre ces fait, cette peste vénitienne du XXIème a causé de nombreux ravages et déjà fait des victimes en quantité.

Chose surprenante, elle atteint principalement les hommes et femmes politiques ou de pouvoir, les hauts fonctionnaires, les grands décideurs et les industriels ou les chefs d’entreprises puissants.

La peste qui sévit à Venise se propage à cause de l’appât du gain, la corruption, le détournement de fonds publics, le financement illicite, la fraude fiscale…

… en réalité, cette peste atteint déjà tout le monde dit « civilisé », et dans nos nations occidentales ou l’argent et l’égoïsme sont devenus les seules religions, elle a fait de nombreuses victimes. A nous de nous en protéger avec efficacité avant qu’ils n’emportent le monde dans leur décadence et la décomposition de leur système.

Notre amis Stefano Sofiato a filmé les coulisses qui ont menées à la réalisation de cette photo.

Pour que la vidéo ci-dessous marque les esprits et fasse le tour de la planète grâce à vous toutes et tous.

Il fut un temps où la lagune n’était pas une poubelle

Les anciens s’accordent tous pour faire la même affirmation, dans leur jeunesse, l’eau était plus limpide qu’aujourd’hui, et moins haute.

Arsenale1960

Sur cette photos prise entre les deux guerres à l’occasion d’une grande marée basse, on peut voir les galets derrière l’Arsenale. La passerelle de fer n’existait pas encore, et celle de bois, plus basse, semblait bien plus périlleuse.

Ce que l’on remarque surtout, sur cette photo, c’est qu’il n’y a aucun déchet, aucun plastique, aucune bicyclette rouillée et pas plus de vieille machine à laver le linge sur les galets. Si l’eau baissait autant de nos jour, le spectacle ne serait pas le même !

Arsenale

1897

C’était une époque où, enfant, on pouvait pécher dans les canaux, et dès que la chaleur écrasait la ville, se baigner sans danger.

June Cunningham, 1957

En septembre 1957, l’actrice anglaise June Margaret Cunningham pose en bikini sur la plage du Lido de Venise, en face de l’hôtel Elxelsior.

June Margaret Cunningham sur la plage du Lido de Venise en 1957

Elle est venue à Venise, du 25 août au 8 septembre, pour la Mostra de Cinéma, présidée par le réalisateur français Renée Clair.

La jeune actrice, de 22 ans à l’époque, a joué le rôle de Marlene Hogg dans une comédie The Smallest Show on Earth (Sous le plus petit chapiteau du monde) qui ne crèvera pas l’écran en dehors des îles britanniques.

The Smallest Show on Earth

En 1957, la Mostra consacrera le film  L’Invaincu (Aparajito) de Satyajit Ray qui se verra décerné le Lion d’Or, le New Cinema Award, le prix Fripesci.

L’autre grand vainqueur étant Fred Zinnemann pour Une Poignée de Neige.

Quand à June Cunnigham, elle tournera encore, pendant six ans, dans une quinzaine de films, dont aucun ne connaîtra une réelle notoriété. Après 1963 elle ne fit plus aucune apparition et l’Histoire du Cinéma semble l’avoir totalement oublié.

Il nous reste donc juste une photo sur une plage de Venise…

20 juillet 1954

Il y a soixante ans jour pour jour, le Circo Nationale Togni avait déployé son chapiteau sur le campo San Polo, à Venise après avoir, la veille, fait une traversée de la ville depuis la gare Santa Lucia qui restera mémorable.

Le Circo Togni à Venezia, le 19 juillet 1954

A propos de la traversée de la ville, dont se souviennent nombre de vieux vénitiens, voir notre article Le Circo Togni à Venise.

Pour la première fois, une cinquantaine d’artistes venaient se produire dans le cœur historique de la cité lagunaire, mais ce qui a marqué l’imagination des enfants de l’époque, reste sans conteste la traversée de la ville par les animaux, éléphants en tête de cortège.

Le Circo Togni à Venise

Le fait de voir des tigres dans notre ville flottante, ou des éléphants faisant une pyramide sur le pont des Scalzi, et encore des chameaux dans les calli de San Marco était très inhabituel.

De mémoire vivante, il n’y a rien qui puisse dépasser l’émotion de ces heures magiques et exceptionnelles, tant pour les artistes du cirque que pour les vénitiens. Même le public le plus profane, ne pouvait que rester fasciné par un monde si étrange, si proche, ne pouvait avoir les mots pour décrire un spectacle hors du commun. Le cirque Togni avait imaginé un programme qui fait encore envie de nos jours, et qui semble désormais impossible à réaliser de nouveau.

Sur la piste se succédèrent les étoiles circassiennes de l’époque : le Duo Loredani au trapèze, les Fratelli Martini à la corde. Le Trio Cavallini (Luigi Cavallini, Pietro et Peppino Balaguer), parmi les plus célèbres clown italiens, cité par l’historien Cervellati. Toute la famille de Wioris Togni, frère de Darix et fils d’Ercole. Dolly Togni, autre fille d’Ercole, admirable et sensuelle cavalière, qui présenta son numéro de chevaux en libertés, majestueux.

Albert Darix et son épouse Violette Carrè présentèrent un autre numéro équestre d’une extrême élégance.

Mais les chevaux n’étaient les seuls animaux présent dans ce cirque qui se vantait de posséder un des plus grands zoo mobile d’Europe. Les chimpanzés, chameaux, chiens, tous les félins mais surtout les éléphants. Les éléphants qui ont salué la ville depuis le  Ponte degli Scalzi menés par le prestigieux Ugo Miletti dont certains se souviennent encore aujourd’hui comme un génial dompteur d’éléphants. Et puis, il y avait Darix Togni

Darix, la légende parmi les félins, devenu dompteur par hasard, en cinq jours, en Septembre 1946, il reste l’unique exemple à travailler avec la même élégance féline du geste. Venise a toujours été un objectif pour lui et il a réussi, juste à l’été 1954, lorsque, pour remercier un public si affectueux, il a fait présenter un numéro qui fut le premier d’une longue vie, de celui qui lui était si précieux : Livio, 4 ans, son propre fils, qui se produisit à Venise pour la première fois.

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« Venise du dix-neuvième siècle », un album de photos de 1891

Венеция ХIХ века » альбом фотографий 1891г.

Les photographies originales d’une époque révolue de Venise, trouvées dans la première édition, seulement en italien de « Canali E Calli » à Venise.
Оригинальные фотографии ушедшей эпохи Венеции, от первого и единственного итальянского издания « Calli E Canali » в Венеции.

Ferdinando Ongani était vendeur de livres anciens, et possédait une boutique sur la Place Saint-Marc à Venise. Son amour pour Venise et  l’architecture, l’a incité à créer un album de photos de sa ville bien-aimée.
Фердинандо Онгани был продавцом антикварных книг, с магазином на площади Святого Марка в Венеции. Его любовь к Венеции вдохновила его на создание альбома фотографий архитектуры любимого города.

Le Musée de San Marco à Venise, a organisé une exposition, en 2011, dédiée à cet album.
Музей Сан-Марко в Венеции организовал выставку в 2011 году, посвященную этому альбому.

Lucien Clergue, Nus vénitiens

Nous supposerons que vous connaissez Lucien Clergue au moins en tant que fondateur de l’école de photographie d’Arles, ville où est organisé chaque année un exceptionnel festival de photographie.

En 1979, il soutient sa thèse de doctorat en photographie. La discipline n’existait pas avant.

Puis, il réponds favorablement à l’appel de Cornell Capa – le frère de Robert – qui décida la même année une opération pour sauver Venise. Il fit appel à Lucien Clergue qui réalisa ces photos dans le palazzo Brandolini (à côté du ponte de l’Accademia), qui leur a été aimablement prêté.

Apollinaire voyait en Venise le « sexe femelle de l’Europe« . Bien plus qu’un décor, bien plus qu’un fantasme, elle a semé le trouble dans l’imaginaire et l’érotique des écrivains comme jamais aucune autre ville.

Le topos même de l’érotisme. De cette légende propre à la Cité des Doges, Lucien Clergue a tiré un scénario en images que Marc Lambron a chanté avec ses mots subtils. Ensemble, œil et voix, ils restituent une vision fugitive de deux femmes, l’une brune, l’autre blonde et un jeune homme, un jour d’été, à l’étage noble et sous les toits, qui, alors que le soleil pénètre brutalement par les fenêtres ouvertes, sont saisis par l’objectif dans toute leur beauté nue, dans ce somptueux palazzo baigné de clair-obscur.

De cette expérience est né un livre : Nus vénitiens.

Lucien Clergue, Nus vénitiens

Nus vénitiens n’est pas une simple invitation au voyage, à travers les photographies du célèbre photographe, ami de Picasso et de Jean Cocteau, alors qu’il était jeune débutant, le lecteur est convié à inventer son propre récit, sa rêverie, ou son propre scénario. Lucien Clergue souhaite que le lecteur crée sa propre histoire au gré de ses photos mystérieuses associées à la plume de Marc Lambron.

Venise n’est pas une cité comme les autres. Outre sa beauté architecturale, son nom évoque aussi bien Titien, Casanova, les jeux et les plaisirs dont elle s’était fait une spécialité dans l’Europe du XVIIIème siècle.

Lucien Clergue confie volontiers que « … faire des photographies de nus à Venise, c’est le rêve absolu !« 

Lucien Clergue, Nus vénitiens

Lucien Clergue, Nus vénitiens

Lucien Clergue, Nus vénitiens

Lucien Clergue, Nus vénitiens

Lucien Clergue, Nus vénitiens

Lucien Clergue, Nus vénitiens

Ambiance Piazzale Roma

Vous serez nombreuses et nombreux, pendant les trois prochains mois à transiter par la piazzale Roma, à Venise.

Et chaque fois vous pesterez contre cette foule dense, ces touristes qui semblent désorientés, ces voitures dans tous les sens, et ces autobus et autocars qui tournent dans un mouvement continu, à vous donner le vertige.

Rassurez-vous, le ponte della Liberta a été construit en 1931, et depuis, cela fait 80 ans que c’est ainsi, et, tout ce que l’on peut souhaiter aux touristes, c’est que cela perdure de la sorte. Car tant qu’il y aura du bordelo romano à l’entrée de la ville cela signifiera que les idées protectionnistes de numerus closus ou de péages pour touristes n’auront pas été mise en application par la minorité la plus à droite sur l’échiquier politique vénitien.

Pour vous remonter le moral, voici quelques photos de la piazzale Roma, toujours très animée, au cours des siècles. Une manière de revoir d’anciens modèles de véhicules de toutes sortes depuis l’entre deux guerres… et, peut-être de faire remonter des souvenirs à certains d’entre-vous.

Les photos sont extraites de la collection photographique Giacomelli, aux archives de Venise.

Ambiance Piazzale Roma

Ambiance Piazzale Roma

Ambiance Piazzale Roma

Ambiance Piazzale Roma

Ambiance Piazzale Roma

Ambiance Piazzale Roma

Ambiance Piazzale Roma

Ambiance Piazzale Roma

Ambiance Piazzale Roma

La construction du Rio Novo – Venise 1931

Le creusement d’un nouveau canal dans le sestiere de Santa Croce fut décidé lors de la construction du pont reliant Venise au continent, et du vaste réaménagement de cette partie de la ville pour créer la piazzale Roma.

La construction du Rio Novo

Alors que Venise cessait d’être complètement un île, un esprit de modernisme allait donner à cette partie de la ville un visage totalement différent.

La construction du Rio Novo

Déjà, cette partie de Venise avait connu quelques bouleversements. En 1834 le peintre et scénographe de la Fenice, Francesco Bagnara, professeur à l’Académie des Beaux-Arts de Venise, avait dessiné le plan des Giardini Papadopoli qui ont été réalisé à l’emplacement de l’ancien monastère et de l’église Santa Croce à la suite de sa destruction.

Sur une surface d’environ 12 000 m2 furent plantés des arbres de grande hauteur ainsi que des arbres fruitiers, des mûriers et des fleurs rares entre les éléments architectoniques utilisés par Bagnara à l’exemple de Selva pour les Giardini napoleonici. Ces jardins de belle allure furent remaniés en 1863 par le paysagiste français Marc Guignon de manière à accueillir des fêtes nocturnes et de riches réceptions.

La construction du Rio Novo

Mais, suite aux aménagement liés à la construction du nouveau pont, le jardin fut coupé en deux par le creusement du canal en 1933.

Le projet de creusement de ce nouveau canal, était de faire diminuer la circulation, déjà trop importante, dans le Canalasso (le Grand Canal). L’ingénieur Eugenio Mozzi était responsable de la réalisation des travaux d’excavation du Rio Nuovo et la construction des ponts qui le traversent : Ponte della Sbiaca, P. della Ceraria et le P. Foscari.

Les travaux mirent à jour d’antiques pieux utilisés pour les fondations des constructions.

Rio Nuovo

Rio Nuovo

Rio Nuovo

Après la construction du canal, on décida de faire passer par là une ligne de vaporetto, équipée de 8 nouveaux bateaux spécialement conçus, plus faciles à manœuvrer, baptisés du nom de célèbres palais vénitiens. Cette ligne réduisait grandement le temps de transport entre la piazzale Roma et la piazza San Marco. C’était le vaporetto de la ligne 2 Acnil, qui reste encore dans l’esprit de nombreux vénitiens qui l’ont utilisée.

A cette époque, les taxis et bateaux privés pouvaient emprunter ce canal, mais pas les gondoles. On avait construit une sorte de voie rapide au cœur de la ville.

La construction du Rio Novo

Comme a cette époque, on commençait déjà à se plaindre des dégâts du moto ondoso sur les fondations des maisons causées par la propulsion à hélices, ces nouvelles embarcations étaient équipées de propulseurs d’étrave expérimentaux conçus en Allemagne, et surtout d’une nouvelle forme de coque. Mais l’ancienne ligne 2 a tout de même été supprimée, suite aux protestations des riverains.

Depuis, les gondoles ont le droit d’emprunter le canal.

Ce canal présente un certains nombres de particularités : c’est le seul canal de Venise où la circulation se fait à gauche. On peut encore y voir des feux tricolores de circulation, autrefois destinés à réguler une navigation que l’on avait espérée dense.

La construction du Rio Novo

Rio Nuovo

Rio Nuovo

La construction du Rio Novo

La construction du Rio Novo

La construction du Rio Novo

La construction du Rio Novo

La construction du Rio Novo

La construction du Rio Novo

Rio Nuovo

L’Atlantique noir de Nancy Cunard

Avec L’Atlantique noir, le musée du Quai Branly fait le portrait d’une poétesse anti-coloniale, amoureuse des noirs de Harlem à l’Afrique en passant par les Caraïbes et qui leur a donné l’occasion de parler de leurs pays, de leurs arts, de leurs traditions et de leurs histoires dans une Anthologie nègre.

« Je suis l’inconnue, l’étrangère
Hors la loi, rejetée par les règles de la vie
Fidèle à une loi unique, une logique personnelle
Qui ne se mêle à rien et refuse de s’incliner
Devant les règles générales. »

L’Atlantique noir de Nancy Cunard

Mais nous vous parlons de Nancy Cunard, dans un blog qui ne parle QUE DE VENISE, un autre nom célèbre nous vient alors aussitôt à l’esprit : Louis Aragon.

Il faut remonter aux années 1920. Louis Aragon, jeune poète surréaliste sans le sou, se lie avec Jacques Doucet, élégant couturier de la Belle Époque et mécène amoureux des lettres.

De 1926 à 1928, Louis Aragon vivra avec Nancy Cunard.

Commencement : Le 10 mars 1896, Nancy Cunard naît dans un château médiéval, Nevill Holt, dans la campagne anglaise, entre un père un peu effacé, Sir Bache, héritier d’une riche famille américaine installée en Angleterre depuis le milieu du XIXe siècle, et Maud, sa mère, jeune Américaine originaire de San Francisco, fantasque et beaucoup plus extravertie, qui fait de Nevill Holt un lieu de haute mondanité et de culture. Vers 1910, Lady Cunard quitte son mari et le château pour s’installer à Londres avec sa fille. Les relations de la mère et de la fille se dégradent. Au début des années 1930, Nancy Cunard rendra même publique une lettre-pamphlet contre Maud, Le Nègre et Milady : elle y dénonce le racisme de sa génitrice. Depuis 1920-1921, la jeune femme est installée à Paris.

A partir de 1924, son appartement de l’île Saint-Louis devient un lieu des mieux fréquentés : Man Ray et William Carlos Williams, Walter Berry, Edith Wharton, Léon-Paul Fargue, Drieu la Rochelle,  la bande qui gravite autour de Jean Cocteau et celle d’André Breton, Beckett, Nijinski, Rubinstein, les Fitzgerald, et cent autres écrivains et artistes dans la famille desquels elle était entrée en publiant plusieurs recueils de poésie et en éditant elle-même les livres qui lui plaisaient.

Tristan Tzara, le fondateur de Dada devient son compagnon, René Crevel sera aussi, jusqu’à son suicide, l’un de ses proches… Le jeune Marcel Jouhandeau la décrit en « une ogresse maigre dont le long corps a la froideur envoûtante des serpents. »

Aragon rencontre Nancy en 1926, à Paris, elle n’en fera qu’une bouchée. 

Coup de foudre dans un ciel d’orage.

Nancy Cunard semble beaucoup mieux maîtriser la relation que le jeune poète, qui écrit à Jacques Doucet en avril : « Je suis le prisonnier de l’amour je pense d’une façon définitive. » Voyages. Dépenses. Crises. Le Paysan de Paris sort en juillet et Aragon travaille à son grand projet romanesque, La Défense de l’infini.

Nancy Cunard

Nancy Cunard fut-elle le grand amour d’Aragon?

Aragon fut-il l’homme le plus aimé de la blonde, mince, belle et irrésistible Anglaise? La concurrence fut innombrable. Aidée par sa fulgurante beauté archétype de cette époque, un célibat , surtout une ablation de l’utérus (dont  on ne sait si cela fut du à la conséquence d’une maladie vénérienne) sa position sociale, Nancy fit tourner bien des têtes et collectionna les amants. Décidait-elle de s’emparer d’un homme? Aucun ne résistait. Elle collectionna les amants comme elle collectionnait les bracelets d’ivoire dont elle avait l’habitude de couvrir ses bras.

Longiligne, un port et une grâce évidente, une coupe à la garçonne, sa vie sexuelle ne fut pas le moindre de ses talents.

Un an plus tard, dans une chambre de l’hôtel de la Puerta del Sol, il fait une tentative de suicide auprès d’elle après avoir brûlé dans la cheminée les 1 500 feuillets du manuscrit de La Défense de l’Infini (dont seul un chapitre sera sauvé, Le Con d’Irène, livre érotique où Aragon a mis beaucoup de Nancy). Mais les circonstances de cet autodafé sont plus qu’obscures, et la confession d’Aragon, comme toujours, suspecte.

Nancy, Aragon l’a aimée ou plutôt, il l’a adorée, ce qui n’est pas pareil. Dans l’adoration, l’amour cesse d’être une quête ou un mystère, c’est un joug sacré. Pour une fois, Arangon est explicite : « J’étais amoureux d’une femme extraordinairement belle. D’une femme en qui j’avais cru comme en la réalité des pierres. D’une femme que j’avais cru qui m’aimait. Je suis un chien, c’est ma façon« .

Au cours de l’été suivant, Nancy organise un séjour en Italie. Avant une première étape à Venise, elle envoie une longue lettre à Janet Flannet où elle explique qu’Aragon est vraiment un garçon délicieux, « une personne douce et délicate, un compagnon idéal, mais moi, je suis toujours insupportable« . Lors d’une halte Florence, Nancy tient à présenter Aragon à Norman Douglass. Les crises atteignent, à Venise, leur point culminant.

Nancy trompe Aragon avec celui qui deviendra un de ses grands amants, l’afro-américain Henry Crowder, originaire d’Atlanta, Georgie, pianiste de l’orchestre de jazz d’Eddie South, qui se produisait alors à l’hôtel Luna. Nancy est folle de jazz et de jazzmen noirs. Ce sont, pour elle, les vrais révolutionnaires, comme le seront plus tard à ses yeux les combattants de la guerre d’Espagne… Aragon ne fait pas le poids et ne supporte plus son rôle de « gigolo« .

Vers la fin de la première semaine de septembre 1928, dans sa chambre de l’hôtel Danieli, Louis Aragon se gave de barbituriques. Il est sauvé de justesse une fois de plus… suicide d’opérette diront les mauvaises langues.

La vie reprend son cours. Louis Aragon rencontre le poète russe Maïakovski

Le mercredi 7 novembre 1928, Louis Aragon et Elsa Triolet se réveillent pour la première fois dans les bras l’un de l’autre. Elle se pelotonne amoureusement contre lui. Il serre dans ses bras ce minuscule corps dont il a tiré tant de plaisir. Les deux amants se regardent, encore étonnés de la passion de la nuit. Voilà douze heures, ils ne se connaissaient pas. Et maintenant, ils ont fait l’amour comme des bêtes. Elle a 32 ans, il en a 31 et c’est le début d’un mythe largement mis en scène. Les yeux d’Elsa n’effacèrent vraiment jamais la cicatrice laissée par Nancy. Elsa Triolet Elsa Triolet, reste lucide sur la nature du lien qui attache encore son compagnon à celle pour qui « toute respiration tourne à la tragédie ». Elle parlera même d’une « initiation à la jalousie ». Maintes pages d’Aragon garderont les traces de cette passion, dans Le Roman inachevé et dans La Mise à mort notamment.

Nancy Cunard, elle, oublie vite Aragon. Ou du moins place-t-elle sa liberté plus haut.

Nancy Cunard est morte le 16 mars 1965, dans une salle commune de l’hôpital Cochin. On l’avait ramassée dans la rue, effroyablement maigre, l’esprit en déroute.

Nancy Cunard

Bibliographie :

Nancy Cunard, de François Buot, Éditions Fayard

Aragon, la seule façon d’exister, Grasset, 1997

Aragon, un destin français, Pierre Juquin, Éditions de La Martinière

Exposition :

« L’Atlantique noir » de Nancy Cunard Negro Anthology (1931-1934), commissaire Sarah Frioux-Salgas, du 4 mars au 18 mai 2014, Mezzanine Est, Musée du Quai Branly, 222, rue de l’Université, Paris 7e. Tel. 01. 56 61 70 00

Christian Lallier expose le Carnaval de Venise

Pour celles et ceux de nos lectrices et lecteurs qui résident en Rhône-Alpes, il vous êtes nombreux, Christian Lallier, photographes connu de tous nos amateurs de Carnaval, vous propose plusieurs rendez-vous.

Nouvelle soirée photo le 23 janvier !

Tous les quatrièmes jeudi du mois, le Club Photoshop de Lyon organise une représentation d’œuvres photographiques en présence des auteurs, afin que ceux-ci puissent présenter leurs démarches artistiques.

Passionné depuis toujours par la sérénissime Cité des Doges, Christian Lallier nous fera partager sa vision particulière de l’alchimie entre Venise et les costumés du carnaval.

La séance aura lieu à la S.E.P.R (Société d’Enseignement Professionnel du Rhône), 46 Rue Professeur Rochaix 69003 Lyon, dans la salle de l’amphithéâtre Félix Rollet jeudi 23 janvier 2014, à partir de 18h30.

Ces rencontres sont gratuites et ouvertes à tous, adhérents ou non adhérents du Club Photoshop de Lyon. Pour des soucis d’organisation, merci toutefois de vous inscrire grâce à ce lien.

Puis, il exposera ses photos de Venise pendant le Carnaval, au restaurant 21 sur vin, 21 Boulevard Eugène Deruelle, 69003 Lyon, qui seront visibles en ce lieu du 31 janvier au 15 mars ,  puis du 15 mars au 15 avril à l’Artisan Cuisinier un autre restaurant de Lyon, situé 125 avenue Lacassagne,  69003  Lyon.

AFFICHE-Expo-21-SUR-VIN

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