Marino Falier

L’opéra Il Bravo (1839) de Saverio Mercadante montre bien cette atmosphère trouble pesant sur le Conseil des Dix, qui reste toujours dans l’ombre, à l’inverse de I Due Foscari. Ce « bravo » est un assassin à gages, au service du Conseil, qui le « tient » par le fait que son vieux père est emprisonné… les Dix poussent la vilenie à ne pas révéler à leur bravo la mort de son père, qui l’eût ainsi libéré de leur redoutable emprise.

On voit dans quelle atmosphère se dessine l’histoire de Marino Faliero… mais qui était-il avant d’accéder à la dignité de doge ?   Il était né vers 1285, mais on sait peu de choses à son sujet avant l’âge de trente ans, époque où on le trouve membre du Conseil des Dix, à peine constitué, à cause de la conjuration de Tiepolo. De noblesse ancienne et propriétaire de vastes terres, Faliero n’en était pas moins un homme d’action, hautain mais courageux, digne vainqueur du roi de Hongrie lors de la bataille de Zadar (Zara en italien) qui donna la ville dalmate aux Vénitiens pour de longs siècles. Homme violent pourtant, que cet altier Faliero, n’hésitant pas à gifler un évêque qui s’était présenté en retard à une cérémonie présidée par lui.

Il fut élu doge à près de soixante-dix ans et si l’Histoire retient son ambition comme le germe de la conspiration lancée par lui, poètes et musiciens préférèrent utiliser un élément plus romanesque. Il se trouve que lors d’une fête, à la fin de l’année 1354, un groupe de jeunes patriciens mené par Michele Steno manqua de respect à la dogaresse Alcuina Gradenico. Mais cette partie de l’histoire, nous vous l’avons déjà racontée !

L’épisode de la conjuration de Marino Faliero a été porté à la scène à plusieurs reprises :

  • Marino Faliero, Doge de Venise, tragédie historique en cinq actes et douze tableaux de Lord Byron, terminée le 16 juillet 1820.
  • Marino Faliero, tragédie en cinq actes et en vers de Casimir Delavigne, représentée pour la première fois au Théâtre de la Porte Saint-Martin à Paris le 30 mai 1829 et la pièce devint vite populaire. En effet, une lettre de Donizetti nous apprend comme la familiarité du public avec l’œuvre fut l’une des causes de son choix pour en faire un opéra, l’action en serait, ainsi plus intelligible, car l’opéra serait chanté en italien.
  • Marino Faliero, tragédie lyrique en trois actes, musique de Gaetano Donizetti, livret d’Emanuele Bidèra, créée au Théâtre des Italiens de Paris le 12 mars 1835. Les deux textes précédents sont les sources du jeune librettiste Emanuele Bidèra, choisi par Donizetti en désespoir de cause car Felice Romani, comme à son habitude, disparaissait de la circulation au moment d’honorer ses (trop nombreux) engagements…
  • Marino Faliero. A tragedy, pièce d’Algernon Swinburne publiée en 1885.

La naissance de Venezia

L’Adriatique, rencontrant plusieurs fleuves de la plaine du Pô, avait formé un dédale de lagunes, de rivages, d’îles et de terrains vagues couverts de roseaux qui à marée basse émergeaient des fonds boueux, alors qu’à marée haute, ils étaient recouverts part des eaux saumâtres chargées d’un limon boueux…

Un peuple, jaloux de sa liberté, et repoussé là par la terreur des hordes barbares qui dévastaient la région y chercha refuge, acceptant dès lors d’affronter cette terre incertaine. Ces populations italiques trouvèrent refuge dans des lagunes d’où nul ne viendrait les déloger. Nul n’oserait s’aventurer dans ce lacis de chenaux, de vasières, de joncs masquant la vue.  Ce monde aquatique inhospitalier où terre et eau se fondaient et se confondaient. On commença par signaler, dans les eaux, les lieux possibles d’accostage et les passages sûrs en y plantant des milliers de poteaux, les « bricoles. »

Le milieu le plus accueillant, bien égoutté, protégé du large par les dunes de sables était la longue langue de terre étroite, sableuse, qui signait la limite entre la mer et la lagune. Les premiers réfugiés construisirent là les huttes colonisatrices qui deviendraient, bien plus tard, des villages de pécheurs. Ensuite, sur les eaux calme de la lagune, autour de ces iles, cette poignée de réfugiés commença, sans le savoir, probablement, à construire ce qui serait une civilisation. Ils posèrent alors les premières pierres, le premiers pieux d’une cité merveilleuse dont ils avaient rêvés. Une cité paisible tournée vers le hommes et la beauté, sortie de leurs rêves et de leur imagination, comme d’un de ces épais brouillards qui enveloppent la lagune.

Dédale de passes et d’ilots, ce refuge stratégique apportait quelque chose de plus, une protection comme maternelle dans cet élément pâteux, empli d’une eau consistante, substantielle, une eau propre à engendrer la vie, la matière première de la ville naissante. Dans ces longues étendues plates de la lagunes, les premiers habitants inventèrent un mode d’exploitation original, genèse de la richesse de Venise pendant des siècles. Combien fallu-il de tâtonnements pour inventer les marais salant, combien d’échec, combien de ruines, combien de tempêtes hivernales détruisant le travail inachevé à cause des pluies de l’automne.

Ainsi, pierre après pierre, pieux après pieux, vie après vie, pendant des siècles allait se bâtir une œuvre qui dépasse les hommes et qu’il est de notre devoir de respecter et protéger désormais : La Sérénissime.

Ces quelques lignes nous ont été inspirées par les sublimes photos de Fulvio Roiter (né à Meolo, près de Venise), que nous avons extirpées de son très bel album « Vivre Venise » publié en novembre 1978.

Les traces de Giacomo… pendant l’exécution de Damiens

Le jour de l’exécution de Damiens, pendant que le condamné subis la sentence dans d’atroces douleurs, ils se passe, derrière la fenêtre où Casanova et ses amis se sont regroupés pour « le spectacle », des choses bien étranges…

Au supplice de Damiens j’ai dû détourner mes yeux quand je l’ai entendu hurler n’ayant plus que la moitié de son corps ; mais la Lambertini et Mme XXX ne les détournèrent pas ; et ce n’était pas un effet de la cruauté de leur cœur.

Elles me dirent, et j’ai dû faire semblant de leur croire, qu’elles ne purent sentir la moindre pitié d’un pareil monstre, tant elles aimaient Louis XV.

Il est cependant vrai que Tireta, dit « Six coups », qui ne parlait pas français mais seulement italien, tint Mme XXX si singulièrement occupée pendant tout le temps de l’exécution qu’il se peut que ce ne soit qu’à cause de lui qu’elle n’a jamais osé ni bouger, ni tourner la tête.

Etant derrière elle, et fort près, il avait troussé sa robe pour ne pas y mettre les pieds dessus, et c’était fort bien.

Mais après j’ai vu en lorgnant qu’il l’avait troussée un peu trop ; et pour lors déterminé à ne vouloir ni interrompre l’entreprise de mon ami, ni gêner Mme XXX, je me suis mis de façon derrière mon adorée que sa tante devait être sûre que ce que Tireta lui faisait ne pouvait être vu ni de moi ni de sa nièce.

J’ai entendu des remuements de robe pendant deux heures entières, et trouvant la chose fort plaisante, je ne me suis jamais écarté de la loi que je m’étais faite.

J’admirais en moi-même plus encore le bon appétit que la hardiesse de Tireta, car dans celle-ci j’avais été souvent aussi brave que lui.

Quand j’ai vu, à la fin de la fonction, Mme XXX se lever, je me suis tourné aussi.

J’ai vu mon ami gai, frais et tranquille comme si de rien n’était ; mais la dame me parut pensive, et plus sérieuse que d’ordinaire.

Elle s’était trouvée dans la fatale nécessité de devoir dissimuler et souffrir en patience tout ce que le brutal lui avait fait pour ne pas faire rire la Lambertini, et pour ne pas découvrir à sa nièce des mystères qu’elle devait encore ignorer.

L’Aigle et le Lion – Napoléon et Venise (1796-1814)

Napoléon et Venise : la chute de la Sérénissime République a été racontée bien souvent.

Mais la liaison forcée entre Napoléon et Venise ne s’arrête pas à ces prémices. Elle se prolonge tout au long de la prodigieuse épopée de l’Aigle, dans un chaos d’événements qui vont bouleverser la carte de l’Europe, et singulièrement celle de l’Italie.

Aucun livre n’avait jusqu’à présent relaté l’étroite et étrange relation qui, de 1796 à 1814, s’est établie entre le conquérant le plus célèbre de toute l’Histoire moderne et la ville la plus célébrée dans toutes les littératures. En cédant, après l’avoir trahie et dépouillée, la vieille dame des lagunes à l’Autriche qui en rêvait depuis toujours, Bonaparte ouvrait la route de la fortune à Napoléon.

Ce forfait allait salir durablement sa gloire. Devenu président de la première République italienne, empereur des Français, il n’aura de cesse de coiffer la couronne de fer des rois lombards pour racheter sa faute et régner sur cette Italie dont Venise était le joyau.

Venise  » napoléonisée « , c’est aussi une page mal connue de cette histoire que la légende a quelque peu escamotée. Malgré une visite réussie dans la Cité des Doges et de sérieuses réformes pour la sauver de la ruine, l’aventure se solda par un échec cuisant et le rejet complet de la présence française.  » Je serai un Attila pour Venise « , la terrible menace prononcée par le général en chef de l’armée d’Italie en 1797 était décidément prophétique. L’Aigle et le Lion n’ont jamais fait bon ménage.

L’histoire du jeune général républicain Bonaparte et de la vieille République Sérénissime de Venise fut celle d’une incompréhension totale. Les pratiques politiques et diplomatiques des Vénitiens se virent confrontées à la puissance et à la violence de l’étoile montante de la Révolution. L’ouvrage d’Amable de Fournoux nous en fait la démonstration mais va au delà de la disparition de la Sérénissime. Il nous présente également les rapports difficiles de la cité en déliquescence sous l’occupation napoléonienne.

Napoléon et Venise (1796-1814)
Amable de Fournoux

  • Broché: 366 pages
  • Editeur : Editions de Fallois (19 février 2002)
  • Langue : Français
  • ISBN-10: 2877064328
  • ISBN-13: 978-2877064323

Et si la Ca’ Dario avait été un palais « complet »…

Le palazzo Dario, tel que nous le connaissons et tel qu’il a été représenté au fil des siècles, semble avoir toujours été un palazzo « tronqué », sans aucune symétrie… mais, en a-il toujours été ainsi ?

Nos longues recherches dans les archives et les bibliothèques nous ont permis de retrouver de troublants documents.

En effet, il était coutume, à ces époques troublées, de prévoir la construction, très onéreuse des palais vénitiens, en plusieurs étapes, en fonction des rentrées d’argent et des opportunités cadastrales. Par exemple, le palazzo Zorzi est un très beau modèle de « réemploi » d’une construction existante au préalable, quand à la Ca’ Rezzonico, il ne fut réellement terminé qu’au XVIIème, après la construction d’un ultime étage sur le Grand Canal.

On peut donc penser que l’extension du palais aurait dû être le résultat du mariage entre Vicenzo Barbaro et Marietta Dario. Nous vous avons déjà expliqué qu’il en fut autrement, et raconté les histoires liées à ce mariage. Toutefois, dès l’entrée dans le sottoportego, des signes nous montrent que, ce que nous avons découvert, était bel et bien prévu.

Voici donc comment vous auriez dû connaître le palazzo Dario si les hommes et l’Histoire en avaient décidé autrement :

Sur ce plan de la façade, on comprends alors la réelle symétrie du palais, tel qu’il avait été élaboré par son concepteur. Et dans l’analyse ci-dessous, on voit que les bases du nombre d’or étaient parfaitement respectées dans l’élaboration de ce projet, conformément à l’architecture grecque en vogue à l’époque.

Francesco Guardi nous montre les fêtes vénitiennes

Note à l’intention de personnes mal intentionnées : Comme beaucoup de nos lecteurs le savent déjà, pour assurer la parution quotidienne de nos articles sur le blog, nous écrivons des articles « intemporels » plusieurs mois, à l’avance. Ces articles peuvent alors être déplacés selon les besoins de l’actualité. Par exemple, l’article ci-dessous à été écrit il y a plus d’un an. Donc, si des esprits éclairés, après nous avoir bloqué l’accès à leur forum de frustrés, imaginent que nous avons quelque intérêt à quoi que ce soit, ils se donnent une importance que nous serions bien loin de leur accorder (n’ayant plus rien à faire sur un forum dont on nous a privé l’accès, si un lecteur assidu ne nous avait informés de ces médisances, nous ne nous serions même pas aperçu de cette chose). Nous n’avons aucun besoin de « pourrir la vie » que qui que ce soit, même si ces gens-là s’ingénient à tenter de médire sur notre travail. Toutefois, les prochains articles programmés ont été vérifiés, et, le cas échéant, reprogrammés à une date ultérieure afin « de ne plus apporter de réponse et pourrir le jeu de 3 crétins jaloux et prétentieux« .

Nous remercions nos lecteurs assidus qui eux, respectent et apprécient le travail énorme que représente ce blog et la parution quotidienne d’un article qui demande d’importantes recherches pour proposer des informations pertinentes. Évidemment, devenir le premier blog francophone sur Venise (et même le second site après e-Venise) , avec ses 300 abonné-e-s et son millier de lecteurs quotidiens provoque des jalousies et des petites mesquineries de basse cour.

Les chiens aboient, la caravane passe…

Le doge, assis, est entouré de ses conseillers. On distingue le grand tableau de Véronèse. Le doge Sébastien Vernier accompagné de divers saints remerciant le Seigneur de la victoire de Lépante, au-dessus d’eux, au fond de la salle du Collège.

La tableau appartient au Musée du Louvre, actuellement prêté au Musée des Beaux-Arts de Dôle. Il provient d’une saisie révolutionnaire de la collection du comte de Pestre de Seneffe (1797). Il appartient à la série des fêtes vénitiennes comprenant douze tableaux.

Aile Denon, premier étage, section 23

Les dix tableaux de Francesco Guardi accrochés dans cette salle, évoquant les solennités organisées en 1763 lors de l’élection du doge Alvise IV Mocenigo (1763-1778) qui est peut-être à l’origine de la commande, font partie d’une série de douze. Guardi peindra les cérémonies du mois de mai 1763, ainsi que les fêtes qui suivront à différents moments de l’année. La série sera sans doute exécutée entre 1775 et 1780, d’après des gravures de Giambattista Brustolon (1712-1796) réalisées à partir de 1776 sur des dessins de Canaletto. Les deux tableaux manquants, le doge à San Marco et le doge sur la place San Marco, sont respectivement conservés, depuis 1802, aux musées de Bruxelles et de Grenoble.

Le doge s’apprête à participer à l’événement majeur des fêtes de l’Ascension, le mariage de Venise avec l’Adriatique (Spozalizio del mare), qui commémore la conquête de la Dalmatie au XIVème siècle. Il va gagner le Lido à bord du Bucentaure.

Le doge, entouré des autorités ecclésiastiques et civiles, se rend à l’église San Zaccaria l’après-midi du jour de Pâques. Il est précédé de dignitaires portant la couronne ducale.

Le doyen des électeurs place la couronne dogale sur la tête du nouvel élu. Des arquebusiers se tiennent de chaque coté de l’escalier des Géants. A droite, sous une arcade, un tapis indique l’endroit d’où le doge s’adressera à la foule.

Le doge est à gauche, sous l’arcade centrale du palais ducal. Une construction provisoire, sorte de temple symbolique portant ses armoiries, a été édifiée sur la Piazzetta. Une pyramide humaine issue d’un concours de gymnastique se dresse à coté d’elle.

La procession solennelle passe sous un long dais dressé à l’occasion des fêtes du Corpus Domini et faisant le tour de la place. Le doge est visible sous la seconde arcade, alors que la tête de la procession est déjà sous la tour de l’horloge, à droite.

Le doge se rend à San Nicolo de Lido pour écouter la messe, après le mariage de Venise avec l’Adriatique (Spozalizio del mare) qui commémore la conquête de la Dalmatie au XIVème siècle. Il s’apprête à remonter sur le Bucentaure après être passé sous un dais tendu pour l’occasion.

Au Musée des Beaux-Arts de Nantes :

Le doge offre un déjeuner aux ambassadeurs dans la salle dite des Banquets, après les avoir reçu dans la salle du Collège du palais. De nombreux convives ont le visage recouvert de la bauta, le masque blanc porté à l’occasion du Carnaval.

Assis sur le trône placé sous le Paradis de Tintoret et entouré du Conseil des Dix, le doge remercie le Conseil majeur dans la salle du palais ducal portant ce nom.  Saisie révolutionnaire de la collection du comte de Pestre de Seneffe (1797).

Au Musée de Grenoble :

Aux Musées Royaux des Beaux-Arts de Belgique :

Venise dans l’oeil de Willy Ronis

Willy Ronis, en 2000, devant l’Eglise Sainte-Anne à Arles - photo M. Vinvent

Dix ans après les célèbres « écuyères du cirque Zavatta« , Willy Ronis est à Venise…

Willy Ronis, photographe français, est un représentant de « la photographie humaniste ». « Que signifie être photographe humaniste ?« , lui avait-on demandé. « Si je peux employer une métaphore, c’est faire de la photo comme l’oiseau chante. Il ne se pose pas la question« , avait déclaré le photographe.

Willy Ronis explique comment fut prise cette photo : « J’avais équipé mon appareil d’un téléobjectif moyen (90 mm) pour rapprocher un peu l’arrière-plan, et je forme des vœux pour que quelqu’un franchisse ce mini-pont de fortune (…) Et le miracle souhaité se produit. Je dois courir pour me remettre à la bonne place et, dans l’urgence à libérer le déclic au moment optimum, mon cadrage est un peu basculé. J’ai pris soin de déclencher à l’instant où les deux pieds de la fillette sont au contact du sol.« 

Willy Ronis en 10 dates :

1910 : Naissance le 14 août, à Paris.
1926 : Premier appareil. Photos de vacances et première série de Paris.
1936 : Son père décède. Il décide d’être photographe reporter indépendant et quitte l’atelier. Premières parutions dans Regards. Reportage sur le Front Populaire.
1938 : Reportages sur les conflits sociaux chez Citroën.
1945-1949 : Grands reportages pour Point de vue, L’Écran français et Regards.
1950 : Travaille comme illustrateur pour Le Monde illustré. Il entre à l’agence Rapho.
1979 : Participe à la Mission photographique pour la direction du Patrimoine, à la demande du ministère de la Culture et de la Communication. Reçoit le Grand Prix national des Arts et des Lettres pour la photographie.
1981 : Reçoit le Prix Nadar pour Sur le fil du hasard publié l’année précédente par Contrejour.
1996 : Grande rétrospective, avec plus de 240 photographies de Paris, au Pavillon des Arts.
2005 : « Willy Ronis à Paris », exposition à l’Hôtel de Ville de Paris en hommage au photographe à l’occasion de son 95e anniversaire.

Il meurt dans la nuit du 11 au 12 septembre 2009, à l’âge de 99 ans.

Marie – Poèmes de Venise

Lors de leur séjour vénitien de 1901, Marie de Régnier, inspirée par Venise, compose quelques poèmes qui seront insérés dans son recueil de poésies paru en 1930.

Alors que son mari, Henri de Régnier est cloué au lit par une pneumonie, durant les longs après-midi passés auprès de lui, elle écrit sur Venise et Vérone. La série de poèmes sera publiée dans la « Revue des deux mondes » en janvier 1902. Ceux concernant Venise : « Verrerie » ; « Marée basse » ; « Jardin de la Guidecca » ; « Campo san Stefano » ; « Jardin Capello » n’apporteront rien à sa gloire, tant l’inspiration y semble si conventionnelle.

Sensible à la magie de la ville, elle discerne aussi, derrière le masque galant, le visage de la gueuse :

Mirant dans l’eau doueuse,
Qui stagne aux carrefours,
Ton visage de gueuse,
Et tes sales atours,

Tu me plais ô marine!
Ô galante! dont l’art
Mélange en ma narine
Ta crasse avec ton fard.

Extrait de « Marée basse« .

Henri de Régnier écrivait que « Venise est construite en couleurs dans la lumière« .

Marie fut, elle aussi, très sensible aux lumières et aux couleurs de la ville :

Tour à tout orangée, ou rouge, ou rose, ou grise,
Découpée ou cassante au soleil qui l’irise,
Comme le reflétaient les détours des canaux
Je la revois, changeante en ses légers cristaux,
Voluptueuse, triste et fardée, et fragile.
Le verre bleuissant mire toute la ville
Matinale et riante, au fond du vase aimé,
Ou me la rends nocturne en son cristal fumé ;
Le dôme de Saint-Marc s’arrondit dans sa panse
Et le col des pigeons en a recourbé l’anse,
Tandis qu’en carillons tintent les pendentifs,
Liquides et gelés, des lustres aux feux vifs.

Extrait de « Verrerie« 

Une histoire des tremblements de terre à Venise

La première mention que l’on retrouve, d’un tremblement de terre à Venise remonte à 745 (et / ou 758), il est dit, alors, que Venise à été frappé ar un tremblement de terre « qui a mis en ruines de nombreux bâtiments et qui a été terrible pour les îles ».

Si toute l’Italie est ravagée depuis la nuit des temps par les séismes, Venise n’est pas dans une zone où l’activité est forte. Il n’y a donc pas un grand danger réel pour la ville lagunaire, du moins directement. Il semble peu probable que la ville soit un jour à l’épicentre d’un séisme.

La carte ci-dessus montre les différentes failles qui parcourent l’Italie, et qui, lorsque les plaques se chevauchent et bougent, provoquent ces catastrophes.

La sismicité historique connue dans cette région ne dépasse pas des magnitudes de 5.9 à 6, et Venise se trouve en bordure, à plus de 100 km de la zone la plus active.

Si les magnitudes des séismes possibles dans la zone demeurent moyennes, la faible profondeur des hypocentres augmente d’autant l’intensité ressentie en surface. Enfin, les effets de site liés à la géologie de la plaine du Pô (liquéfaction des sols) peuvent aussi augmenter la sévérité des dommages.

Dans les temps anciens, le plus grave séisme connu pour Venise fut celui de 1093 qui « storse il Campagnel di S. Angelo e ne seguì, addietro mortalità e carestie« .

Au début du XIIème siècle, on retrouve la trace dans la littérature de deux séismes, le premier en 1106, dit « tremblement de terre de Malamocco », et en 1117 le « Tremblement de terre de S. Ermagora ».  Le premier séisme s’est suivi d’un tsunami qui a dévasté Malamocco : « il mare, come scosso dal suo fondo, penetrando furioso per tutti i porti e le aperture della laguna superava i lidi e tutto inondava. Tante case rovesciate, tanti fondaci guasti. Un’intera isola scomparve ingoiata dai flutti, l’antica Malamocco » (A ce propos, lisez, en italien, Gastone Geron, “Il tesoro di Metamauco“, 1977, éditions Fratelli Fabbri, 152 pages. et parcourez ce site : L’isola sommersa: Metamauco, la piccola Atlantide di Venezia tra storia e leggenda.) Le second était beaucoup violent et ressenti dans tout le nord de l’Italie et en Suisse, et, à Venise « fu un grandissimo tremuoto, e venne un’acqua sulfurea (forse metano) che appiccò fuoco alla Chiesa di S. Ermagora …« 

Au XIVème siècle, le 25 janvier 1348, Venise subit un violent tremblement de terre, le séisme de Villaco en 1348 fut ressenti, moindre, à Venise, mais il détruisit de nombreuses tours. On observa alors les effets inverses d’un tsunami : « Il Canal Grande rimaneva ogni tratto asciutto in modo da lasciare vedere il fondo, mentre l’acqua si riversava ora da un lato ora dall’altro« . La catastrophe fait des centaines de victimes, détruisant de nombreux édifices et provoquant une terrible épidémie de peste qui ne prend fin qu’en 1350, décimant pendant ces deux années le tiers de la population.

Il convient également de rappeler le tremblement de terre du Frioul de 1511. Nous apprenons dans les chroniques l’existence de destructions et de victimes à Venise par la chute de cheminées, statues, ornements et l’effondrement de vieilles maisons et des remparts.

Au cours des siècles ultérieurs, on semble voir une diminution de l’intensité des tremblements de terre, tout en constatant un augmentation de la quantité et de la précision des informations sur les séismes enregistrés aux XVIIème et XVIIIème siècles. Et même le dix-neuvième siècle a été caractérisé par un certain « calme sismique » dans la région de Venise.

En réalité, de petites secousses, liées à une activité sismique constante, secouent la région quotidiennement. Mais on ne les ressent pas.

Un risque majeur avec un séisme dévastateur n’est pas exclu pour la cité lagunaire, mais d’après les études actuelle, il semble que le plus gros danger sismique pour Venise, serait un tsunami provoqué par un séisme au large de la Croatie…

Catherine, princesse à San Michele – XIII

Marie semblait avoir une confiance absolue dans sa sœur Éléonore, pour preuve, la procuration qu’elle lui fait le 10 septembre 1930 :

« du dix septembre dix neuf cent trente. Procuration spéciale .. .. de
Melle Ennès Marie, sans profession, en faveur de sa sœur, mademoiselle
Ennès Éléonore, tous deux domiciliées à Venise à qui elle donne
pouvoir de pour elle et en son nom rendre, citer et transférer
demander et opérer conversion, transferts, mutation ou remboursement
ou faire le dépôt de tous titres d’actions, obligations et inscriptions
de rentes ou autres valeurs nominatives ou titres au porteur, ou de …
titres au porteurs en titres nominatifs.
Aux effets ci-dessus passer et signer tous actes, élire domicile
substituer une ou plusieurs personnes dans tout ou partie des présents
pouvoir et généralement faire tout ce que la mandataire jugera
utile et nécessaire »

Marie Ennès, qui était surnommée Marousia (diminutif russe de Maria), alors institutrice à Besançon, est décédée le 5 janvier 1932, à l’âge de quarante deux ans, dans la calle del Traghetto à Venise, une maison proche du Grand Canal, dans la paroisse de San Felice. L’adresse civile de cette maison étant 3693 Cannaregio. Dans un premier temps, elle fut inhumée dans le champ commun de l’enclos I. On peut supposer que c’est à ce moment que Éléonore, la dernière survivante de la famille s’est préoccupée de la sépulture de sa sœur, et de la sienne.

Marie à été transportée dans la concession N° 27 du secteur Grec, voisine de leurs parents et grand-mère, le 4 février 1932. Le monument funéraire que nous connaissons à été posé le 9 juin 1932.

Éléonore est morte le 5 janvier 1977 à six heures, au N° 47 de la via Torni, à Mogliano Veneto, un petit village de la terre ferme au nord de Burano. Elle a été inhumée avec sa sœur, qui, le 25 de ce mois à été exhumée et enterrée de nouveau dans cette concession à perpétuité.

Après cette date, l’ensemble des biens de la famille à Venise ou à Paris à été vendu.

Olga Petrovich, la dernière gouvernante de la famille est morte, dans l’oubli général et l’indifférence totale le24 octobre 1993. Elle repose désormais, selon ses vœux, près de la famille qu’elle a servi toute sa vie, dans une concession achetée pour elle par Lori (surnom donné à Éléonore dans les dernières années de sa vie).

… avec elle sont parties les dernières traces de l’histoire de Catherine Troubetskoy.

Pietro Cesare Alberti

Les Italiens ont toujours pris une grande place dans l’histoire de New York. Le premier à être arrivé, en 1635 selon les registres, s’appelait Pietro Cesare Alberti (Peter Caesar dans les documents américains). Il avait alors acheté une ferme à Brooklyn (aujourd’hui Fort Green Park) pour y cultiver du tabac.
Par la suite, les immigrants Italiens ont été les plus nombreux et influents dans la ville de New York. Ils importèrent alors avec eux de célèbres institutions : Little Italy, la mafia et la pizza.

Le 2 juin 1635, Pietro Aberti pose pour le première fois un pieds sur la terre américaine à La Nouvelle Amsterdam (qui deviendra New-York). L’Histoire retiendra qu’il est le premier immigrant italien. Pour nous, c’est un vénitien qui s’arrache à sa patrie natale pour conquérir de nouveaux territoires, perpétuant ainsi une longue tradition depuis Marco Polo…

Pietro Cesare Alberti à été baptisé le 20 juin 1608 dans l’église de San Luca à Venise.

Il s’embarque le 10 juillet 1634, auprès du capitaine David Pieterson De Vries, sur le navire hollandais « King David » au départ de Texel, un port alors en pleine extension de la Compagnie Hollandaise des Indes, bateau à destination de la Guyane, puis de la Virginie. Pietro Cesare Alberti était membre de l’équipage, mais on suppose que le noble vénitien était associé avec ces hollandais, alors stationnés sur l’île de Malamocco, au large de Venise, ayant négocié un grade d’officier à bord d’un navire étranger.

Quand le « King David » accoste à la Nouvelle Amsterdam, Pietro Alberti décide de quitter le navire, suite à un différent avec le capitaine qui avait menacé de le débarquer à Cayenne. Ce n’est qu’après avoir engagé des poursuite après cet homme qu’il put recouvrir ses gages.

Seul italien dans la ville, son nom fut mutilé par les scribes néerlandais, et les registres publics conservent de nombreuses orthographes qui font souvent sourire de nos jours : Cicero Piere, Cicero Alberto, Peter the Italian, Caesar Albertus, Pieter Mallenmook, etc Au cours de plusieurs générations, ses descendants ont généralement été appelé par le nom Albertus, enfin Burtus et Burtis, qui a finalement été anglicisé en Albertis, se rapprochant ainsi du nom original italien Alberti.

Le 24 août 1642, Pietro Cesare Alberti épousa Judith Jans  Manje, également orthographié Magnée, (également enregistrée comme Jans) fille de Jean Van Manje, de New Kirk, et Martha Chambert, d’influents colons Wallons, tous deux originaires des Flandres. Les fiancés ont hérité d’une grande maison à côté d’un canal qui traversait l’actuelle Broad Street à Manhattan.

Pietro Cesare Alberti et Judith Manje ont tous deux été tués lors d’une attaque des indiens en 1655.

Source : Long Island First Italian

Giovan Battista Sèssa stampadore

Imprimeur et éditeur de Venise (XV et XVIème ss), originaire de Sessa (Lugano). Actif depuis 1489 (Proverbes de Sénèque) jusqu’en 1509, il a produit d’innombrables éditions de toutes sortes.

Marque d’imprimerie des Sessa (Venise)
Gravure tirée de : « Les Chats, histoires, mœurs, observations, anecdotes »
de Jules-François-Félix Husson, dit Champfleury (1821-1889), publié en 1869.

Au XVIème siècle, l’art de la typographie se développe à Venise et Jean-Baptiste Sessa, imprimeur de Venise, fait figurer un chat portant un rat dans sa gueule sur le charmant motif de son sceau.

Parmi ses éditions remarquables, « Delle maraviglie del mondo » de Marco Polo en 1496, ou, l’l’Arte del ben morire en 1503.

Trois générations de Sèssa imprimeurs se succédèrent à Venise, dont Melchiorre, le père. Puis, ses fils Giovanni Battista et Melchior travaillèrent avec lui. On trouve également la trace d’un autre frère, Giovanni Bernardo, les derniers poèmes retrouvés datant de 1596.

Voir également l’article abondamment illustré sur le sujet dans Les Carnets Vénitiens

The Sessa was an important family of printers active in Venice since the beginning of the century. Giovanni Battista and Melchior Sessa were brothers, sons of Melchiorre Sessa the elder (active 1505-1555), who published in Venice from 1563 through the end of the century. A third and final Sessa imprint of the poem (1596) was published by Giovanni Battista and another brother, Giovanni Bernardo, a collaboration which produced 23 editions between 1596-97. The Sessa used a charming printer’s mark, variously elaborated, depicting a cat with a mouse in its mouth. A version adorns the top of the first page of the Inferno in the 1578 edition to the left and includes the motto « Dissimilium in Fida Societas » (a partnership that is unequal in trust — referring to the cat and mouse of the printer’s device). The Sessa acted as publishers of these three Dantes, but they had the books printed by other well-known Venetian printers of the period: the first and third editions by Domenico Niccolini da Sabbio (active, 1557-1600), the second by Francesco Rampazetto (active, 1577-1602).

Previous Older Entries Next Newer Entries

Tous les articles des derniers mois…